Le titre de cette toile est l’anagramme de :
Extraits d’un poème, fusain, acrylique et pigment sur une toile.

Je l’ai commencé le 19 juillet 2022, en dessinant les mots d’une poésie, « Le parfum », que j’avais écrit quelques mois plus tôt, le 6 février 2021.

J’ai choisi trois passages, que j’ai posé de manière aléatoire sur le support.

Des mots, ont jailli des traits, qui ont donné naissance à l’évocation de deux corps, qui semblent vouloir s’enlacer et se repousser en même temps.

Au regard de la chaleur, j’ai essentiellement travaillé dans la pénombre, avec les ouvertures fermées de l’atelier et les rideaux tirés. Ainsi, j’étais dans l’intimité du sujet de ma création.

J’ai utilisé de l’acrylique pigmentée de bleu pour le texte, et du gris foncé pour le dessin des corps.

J’ai fait intervenir le hasard dans la recherche interactive des couleurs.

Au fur et à mesure que la toile grandissait, de nouvelles formes naissaient, avec l’expérimentation de bleus différents, dans lesquels affleuraient des formes en relief.

J’ai travaillé la forme et le fond simultanément, avec des techniques créant des effets de transparence et de dégradé.

Peu à peu, j’ai envisagé l’idée de concevoir l’ensemble comme un palimpseste :

recouvrir les mots avec de l’acrylique blanche afin qu’ils soient à peine lisibles.

Mais je souhaitais aussi faire intervenir la notion de « corps tatoués », tels des objets de mémoire, en réaffirmant certains traits de la calligraphie.

J’ai tenté de donner une texture à ces corps, que j’ai reconsidéré dans leurs lignes, leurs proportions et leurs matières. J’ai peint avec quatre nuances de bleus, en jouant alternativement sur la transparence et l’opacité.

J’ai cherché à équilibrer ces nuances ainsi que celles des gris colorés, autant pour les formes que pour le fond.

J’ai progressivement ajouté des fragments de corps et j’ai voulu donner un nouveau sens à la matière corporelle, en creusant certaines lettres, dont j’ai accentué les contrastes, tels des cicatrices, donnant ainsi « vie » à la chair meurtrie. Ces corps imprégnés et réanimés, devenaient moins lisses.

Après avoir apposé le titre, inscrit tel un tatouage, j’ai utilisé un glacis sur l’ensemble de la toile dans un souci d’unification esthétique.

Mais j’avais du mal à finaliser cette création, à mettre un terme à son histoire. Tai continué d’y œuvrer en ajoutant des détails de couleurs et de matières.

Si l’origine de ce travail a pris ses sources dans mon histoire personnelle, elle est aussi porteuse d’un regard sur une mythologie :

I’lynx est un oiseau communément appelé Torcol, symbole de l’amour passionné et agité, qui servait dans les enchantements. Il fût donné par Aphrodite à Jason, qui, en le retournant et en prononçant certaines paroles magiques, excita l’amour de Médée.

Par ailleurs, si la couleur bleue invite à l’évasion, au voyage et à la découverte, elle inspire aussi la sérénité et le calme intérieur, qui peut s’acheminer vers une forme de mélancolie.

Dans ce choix précis de représentation, elle est inhérente à l’esprit tourmenté du sujet.

Cette création porte en elle la trace d’une victoire sur des souffrances morales et physiques, au centre desquelles chacun d’entre-nous peut se retrouver.

Je l’ai achevé le 26 août 2022,

Edith BRUIC 31 août 2022